Homophobie - une question aux opposants à la bénédiction
27/05/2015 14:40Aux opposants à la bénédiction des couples mariés de même sexe :
Une question me taraude, une !
Elle est l'articulus stantis et cadentis de l'accusation implicite d'homophobie dont vous vous dites victimes.
Vous avez raison : il n'est effectivement pas obligatoire de mettre couple homosexuel et couple de personnes de sexe opposé sur le même niveau symbolique. Il est évident que le mariage hétérosexuel, comme cellule de base de la famille et de la société, a joué un rôle prépondérant et continuera de le faire. Les couples de même sexe resteront un fait minoritaire et leur procréation demeure liée à des contraintes complexes (adoption, PMA, GPA, fécondation par une personne tierce, enfants d'une relation antérieure ou extérieure au couple...). La communauté ecclésiale ne peut sans doute pas déclarer "bonne" la généralisation de ces modes procréatifs, mais devra les accueillir comme un fait accompli, comme elle le fait déjà concernant les familles recomposées. Elle peut, par contre, proclamer une parole de bienveillance sur ces situations, Dieu sachant faire le bien dans toutes les circonstances, indépendamment de notre mérite ou de notre bonne ou mauvaise pratique.
Ceci posé, voici ma question :
Etant donné que l'homosexualité n'est pas à considérer comme une maladie ni un choix comportemental,
Etant donné que le célibat choisi est un don particulier qui n'est pas à la portée de tout le monde,
Etant donné que le mariage avec une personne du sexe opposé pour laquelle on n'a pas de désir peut se révéler destructeur pour chacun des deux partenaires,
Etant donné qu'une vie sexuelle débordante avec des partenaires multiples et changeants n'est pas conseillée (personne-objet, "idolâtrie de la sexualité"...),
seriez-vous d'accord de dire que
la vie de couple stable avec un partenaire aimant du même sexe
constitue un mode de vie qui peut se révéler bénéfique - ou du moins un moindre mal - pour les deux partenaires,
est un lieu possible d'épanouissement pour eux,
peut être l'occasion pour le couple de se rapprocher de Dieu ?
Si oui, vous dites déjà du bien (relatif) de cette situation. Vous comprendrez également que certains croyants estiment souhaitable de signifier ce "bien", à travers une cérémonie liturgique, même si vous-même n'iriez pas jusque là.
Si non, si vous pensez que les seules solutions qui s'offrent à la lesbienne ou au gay, c'est
- le célibat
- la prière de "conversion sexuelle"
- ou le mariage sans désir avec une personne du sexe opposé,
alors votre position est objectivement homophobe. Même si vous n'avez aucune intention de nuire aux personnes LGBT, même si votre point de vue est motivé par votre lecture biblique, même si vous adoptez une attitude empathique, cette position est violente, d'autant plus si vous avez un ministère spirituel qui vous confère une autorité ! Car la personne lesbienne ou gay qui vous écoutera et désire se conformer à ce que vous présentez comme "volonté divine" la poussera dans des combats intérieurs terribles. Soit, elle arrive à se résigner au célibat en faisant un trait sur un pan de sa personnalité. Soit, elle fait l'impasse sur sa relation avec le Christ, estimant ce qu'on lui demande est inhumain. Soit, elle se battra sa vie entière avec cette partie d'elle-même, essayant de la sublimer, mais subissant régulièrement des échecs. J'ai eu contact avec des personnes LGBT, membres d'Eglises évangéliques, cherchant réellement à se conformer à l'enseignement qu'elles y ont reçu. Mais quand la "pression" devenait trop forte, elles succombaient à la tentation, tout en refusant de se protéger, car prévoir un préservatif lors d'une soirée signfiait pour elles "préméditer le péché". Voyez-vous à quelles pressions votre position expose les croyants LGBT ? C'est la racine de maintes dépressions, fuites dans la dépendance, schizophrénies et autres névroses.
Vous avez un troisième choix : ni oui ni non. C'est le choix de l'humilité qui refuse de choisir entre lecture biblique et enseignement homophobe. Du coup, vous n'imposerez pas votre point de vue à la personne LGBT et la confiez entre les mains de Dieu, en admettant que vous pouvez vous tromper.
Alors ? Quelle est votre réponse ?
Jürgen Grauling
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